Le Dr Flore Bauden, 37 ans, gériatre spécialisée en neurologie, partage son temps entre un hôpital en région parisienne et des Ehpad. À travers son regard sensible, elle évoque les enjeux liés aux maladies neurodégénératives, à la perte d’autonomie, et au rôle souvent invisible des aidants.
Qu’est-ce qui vous a conduite à cette voie ?
Très tôt, j’ai eu un coup de cœur pour les personnes âgées. Leur fragilité et la complexité de leur suivi – souvent liées à des pathologies multiples – m’a donné envie de les accompagner. Ensuite, j’ai découvert le domaine de la mémoire, qui m’a passionnée. Cela m’a naturellement conduite vers la neurologie, pour mieux comprendre les troubles cognitifs liés à l’âge.
Pourquoi faut-il parler des maladies neurodégénératives ?
Parce qu’on en parle encore trop peu, alors même qu’elles concernent de plus en plus de personnes. On commence à mieux les connaître, à les diagnostiquer plus tôt. Il y a quelques années, on parlait simplement de « dégénérescence ». Aujourd’hui, on peut poser un diagnostic précis, ce qui permet d’adapter l’accompagnement : sécurisation du domicile, suivi médical, soutien à la famille… Trop souvent, on agit quand la personne est déjà en grande difficulté. Anticiper, c’est permettre un maintien à domicile plus long. Même sans traitement curatif, des thérapies réduisent les troubles. Il faut aussi rappeler que la vieillesse n’est pas une maladie. Souffrir parce qu’on est âgé, ce n’est pas une fatalité.
Quelle est la place des aidants ?
Elle est centrale. En consultation, il est rare de voir un patient seul. L’aidant – souvent un proche – prend la parole, car la personne aidée minimise ses difficultés. Nous avons des outils pour repérer leur épuisement. Beaucoup s’oublient, au point de négliger leur santé. C’est pourquoi nous proposons aussi des consultations pour eux. Cela permet d’instaurer un cadre, un suivi, et de prévoir des aides : aide à domicile, séjours de répit… Si l’aidant est à bout, il faut agir vite. L’entrée en institution doit rester une solution de dernier recours. Redonner leur place aux personnes âgées, mais aussi à celles et ceux qui les accompagnent, c’est une responsabilité collective.