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Contention physique des personnes âgées :  la formation et l’information sont insuffisantes

Temps de lecture : 4 min

Une récente étude scientifique nous en dit davantage sur le recours à la contention physique en milieu gériatrique. Des progrès restent à accomplir, en matière de formation des équipes et d’informations des patients et des familles.

Fin 2019, la Société française de gériatrie et de gérontologie (SFGG) a publié les résultats de son enquête nationale consacrée cette année à la contention physique dans les structures gériatriques.
Un travail éclairant tant il existe peu de littérature scientifique sur cette pratique sensible, qui pose des questions éthiques sur la liberté fondamentale d’aller et venir. La Haute Autorité de Santé (HAS) rappelle d’ailleurs qu’elle doit rester une exception au regard des répercussions physiques, psychologiques et sociales qu’elle entraîne.

Mais de quoi parle-t-on au juste ? La HAS caractérise la contention physique, dite passive, « par l’utilisation de tous moyens, méthodes, matériels ou vêtements qui empêchent ou limitent les capacités de mobilisation volontaire de tout ou d’une partie du corps dans le seul but d’obtenir de la sécurité pour une personne qui présente un comportement estimé dangereux ou mal adapté ».

Prévenir les risques de chute

L’enquête 2019* de la SFGG révèle que le premier motif largement avancé pour une prescription de contention est le risque de chute. Les autres raisons citées sont l’agitation, la déambulation excessive des personnes âgées ou le maintien de thérapeutique (par exemple en cas d’arrachage de perfusion).

Les matériels de contention les plus couramment utilisés sont la double barrière de lit puis la ceinture avec maintien pelvien. Peu d’établissements interrogés déclarent avoir recours aux draps de contention ou aux gilets harnais.

Dans le détail, l’étude révèle que les personnes de l’échantillon qui ont fait l’objet de mesures de contention sont majoritairement des femmes (60 %), d’un âge moyen de 85 ans et présentant un syndrome démentiel dans 63 % des cas.

60% des Ehpad ont un programme de formation

L’enquête de la SFGG pointe aussi des manques. Si pratiquement toutes les structures ont mis en place une politique institutionnelle sur la contention, les programmes de formation restent insuffisants.

Dominique Somme, professeur de gériatrie à la faculté de médecine de l’université de Rennes 1 et qui a coordonné cette enquête, avance des hypothèses :
« Les politiques institutionnelles sont encore récentes et les taux d’encadrement en gériatrie et gérontologie sont tels qu’ils rendent difficiles les remplacements lors des formations ».

Une autre critique, plus sévère, pointe « les très mauvais résultats concernant l’information aux patients et aux familles, avec des taux de 10 % dans les services de soins de longue durée, ou moins de 20 % dans les soins de suite et de réadaptation. Il y a un important travail à faire pour informer sur les raisons pour lesquelles on a recours à ce type de stratégie », tance Dominique Somme. Avant de poursuivre : « On est un peu dans du non-dit, on l’a toujours fait, donc pourquoi on aurait besoin d’expliquer… On ne peut plus se passer de cette explication ». Environ 70 % des Ehpad de l’échantillon respectent cette obligation d’information.

Enfin, les auteurs de l’enquête ont remarqué que « dans les Ehpad, on utilise plus souvent les contentions avec des horaires adaptés, ce qui est sans doute lié au fait que l’on connaît la personne, ses habitudes, ses risques. Alors que les structures de type MCO** ont plus tendance à avoir recours à la contention 24h sur 24, ce qui est sans doute lié, à l’inverse, à une moins bonne connaissance de la personne ».

L’enquête de la SFGG offre un regard nouveau sur cette pratique qui, rappelons-le encore, doit rester exceptionnelle. Dans son rapport 2019 sur les événements indésirables liés aux soins, la HAS recense 26 EIGS impliquant un problème de contention en 2018, dont la moitié concerne des personnes de 70 ans ou plus. La HAS rappelle les bonnes pratiques pour limiter les risques de la contention physique de la personne âgée.

* Au total, 107 structures ont répondu, correspondant à 3 829 lits. Les répondants sont à 30 % des établissements de médecine, chirurgie, obstétrique (MCO)-court séjour gériatrique (CSG), à 28 % des Ehpad, à 18% des soins de suite et de réadaptation (SSR), à 17 % des soins de longue durée (SLD), à 10 % des unités cognito-comportementales (UCC) ou des unités d’hébergement renforcé (UHR), à 3 % des équipes mobiles gériatriques, et à 1 % des unités de vie de psycho-gériatrie (UVP).  * Médecine – Chirurgie – Obstétrique

Sources :
Citations extraites de l’article : « Gériatrie : la contention physique prescrite d’abord pour éviter les chutes » de Valérie Lespez pour Géronto News.
« Barrières de lits et ceintures sont les modes de contention les plus utilisés en gériatrie », Lydie Watremetz, Hospimedia du 25 novembre 2019
Haute Autorité de Santé

Cet article en synthèse

  • En milieu gériatrique, le recours à la contention physique est d’abord prescrit pour prévenir les risques de chute.
  • Des efforts sont à réaliser en matière de formation des équipes et d’informations des patients et des familles.
  • La Haute Autorité de Santé rappelle que la contention physique doit rester une exception.