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Pourquoi la résistance aux antibiotiques se développe-t-elle ?

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Considérés comme une des découvertes majeures de la médecine, les antibiotiques voient aujourd’hui leur efficacité menacée. Chaque année en Europe, 25 000 décès sont liés à des phénomènes de résistance. Comment en est-on arrivé là ? Quels sont les moyens d’action face à ce problème ?

Les antibiotiques sont utilisés pour lutter contre les infections dues à des bactéries : pneumonies, bronchites, otites, méningites, infections urinaires, septicémies, maladies sexuellement transmissibles… Ces médicaments tuent les bactéries ou bloquent leur prolifération. Mais certaines d’entre elles sont devenues insensibles à ces traitements. On parle alors de résistance aux antibiotiques.

Des infections plus difficiles à traiter

L’efficacité des antibiotiques a motivé leur utilisation massive et répétée. Cette situation a entraîné l’apparition de souches résistantes. En effet, lorsqu’on emploie un antibiotique, seules survivent, et se reproduisent, les bactéries dotées de systèmes de défense contre cette molécule. La mauvaise utilisation des antibiotiques (traitements trop courts, trop longs ou à posologies inadaptées) est également pointée du doigt.

Ponctuelles au départ, ces résistances sont devenues massives et préoccupantes. Certaines souches sont multirésistantes, c’est-à-dire résistantes à plusieurs antibiotiques. D’autres sont même devenues résistantes à quasiment tous les antibiotiques disponibles. Ce phénomène, encore rare en France mais en augmentation constante, place les médecins dans une impasse thérapeutique. Ils ne disposent plus d’aucune solution pour lutter contre l’infection.

D’où vient cette résistance ?

Le phénomène de résistance peut résulter soit d’une mutation génétique affectant le chromosome de la bactérie, soit de l’acquisition d’un ou plusieurs gènes de résistance. Pas seulement spécifique aux bactéries responsables de maladies, la résistance aux antibiotiques touche aussi les bactéries bénéfiques qui constituent notre microbiome*. Les bactéries résistantes représentent en fait un réservoir de gènes de résistance qui pourront être transmis à des bactéries pathogènes.

La prise d’antibiotique va altérer notre microbiome et contribuer à augmenter ce réservoir de gènes de résistance que nous portons. Cela est valable en cas d’infection bactérienne mais également virale (comme la grippe par exemple) contre laquelle les antibiotiques sont impuissants. Le microbiome possède un « effet barrière » contre les infections qui diminue avec son altération. La prise inutile d’un antibiotique a donc un double effet négatif en favorisant la colonisation par des bactéries résistantes (avec un risque d’infection ultérieure difficile à traiter) et l’altération du microbiome.

antibiotiques

Comment lutter contre ce phénomène ?

Pour préserver l’efficacité des antibiotiques disponibles, il faut réduire leur consommation afin de limiter la pression de sélection sur les bactéries. La rationalisation des prescriptions et les campagnes de sensibilisation destinées au grand public (on se souvient tous du slogan « Les antibiotiques, c’est pas automatique » !) ont fait baisser la consommation. Afin que cette tendance puisse s’inscrire dans la durée, il est important que les médecins puissent :

  • distinguer infections virales et bactériennes : des tests de dépistage existent (pour les angines par exemple) mais restent peu utilisés en France,
  • choisir un antibiotique pertinent en cas d’infection bactérienne : mieux vaut éviter l’utilisation systématique d’antibiotiques récents ou à large spectre lorsque d’autres plus courants, ou à spectre plus étroit, suffisent,
  • adapter la cure aux besoins : limiter notamment la durée des traitements au strict nécessaire.

L’hygiène est également un moyen d’éviter les infections et donc les traitements antibiotiques par la suite.

La vaccination contre les infections bactériennes (coqueluche, diphtérie, tétanos, tuberculose, typhoïde…) est aussi une façon d’éviter la maladie et donc l’usage d’antibiotiques.

* Le microbiome humain est composé de virus, de bactéries et de champignons vivant en colonies à l’intérieur du corps et sur la peau.